Sultan de la médina – ياسلطان المدينة
1992

Sultan de la médina – ياسلطان المدينة

Synopsis : Promise depuis l’enfance à son cousin incarcéré, la jeune Ramla est enfermée par sa famille dans une Oukala de la Médina. Dans cet univers clos, elle trouve un allié inattendu : Fraj, un illuminé qui connaît chaque passage secret. Ensemble, ils tentent l’évasion. Mais au-delà des murs, Ramla se heurte à un destin tragique, que les habitants attribueront aux jenouns…

Des ruelles de Tunis aux sentiers du néoréalisme !

 

Critique du film Ya sultan El Medina - Le sultan de la médina - سلطان المدينة 1992

Présenté au Festival des 3 Continents, échos du cinéma indépendant et des voix du Sud, Sultan de la Médina de Moncef Dhouib s’affirme comme un témoignage discret dans la forme, mais d’une puissance implacable dans le fond. À l’image du néoréalisme italien, le film scrute les marginaux de la classe populaire.

Résidents d’une oukala – habitat collectif insalubre – les personnages portent la mémoire d’un monde que seuls les murs de la vieille ville semblent encore reconnaître. La caméra de Dhouib, d’une précision quasi documentaire, s’attarde sur leurs gestes et leurs regards. Chaque détail révèle l’intensité de ce quotidien oublié, donnant aux figures secondaires une densité bouleversante. Ainsi, Dhouib rejoint l’héritage de cinéastes comme Vittorio De Sica ou Roberto Rossellini qui savaient capter dans l’ordinaire la poésie des vies fragiles, reléguées à la marge.

Au cœur de cette société étouffante émergent deux figures. Ramla, une jeune femme séquestrée par les traditions patriarcales, et Fraj, son cousin simple d’esprit, hors normes, qui devient un levier entre les mains des opportunistes. Ramla lutte contre l’oppression physique et symbolique qui l’enferme, Fraj, lui, incarne une autre forme de captivité : celle d’une sainteté imposée.

L’exploitation de Fraj évoque les détournements de la foi présents dans des films comme Miracle à Milan (1951), où la spiritualité est instrumentalisée à des fins matérielles. De Sica insuffle à son récit une poésie douce et lumineuse. Dhouib, quant à lui, choisit l’ironie tragique. Dans ce monde asphyxiant, Fraj et Ramla deviennent des figures d’une humanité vulnérable et pleine de pureté. Ils incarnent des éclats d’espoir inaccessibles..

La médina de Tunis est bien plus qu’un décor : refuge et prison à la fois, elle reflète les luttes intérieures des protagonistes. Ses ruelles saturées de mémoire, renvoient à l’étroitesse des destins. Cette géographie urbaine, vibrante mais aliénante, nourrit le drame humain qui se joue au cœur de l’oukala.

Moncef Dhouib dresse un portrait social saisissant. La quête de dignité qui traverse le film en constitue le cœur battant, animant un cinéma vibrant de vérité. Plus de trente ans après sa sortie, Sultan de la Médina résonne encore. Miroir d’un passé révolu ou reflet d’une injustice toujours actuelle ?

Fadoua Medallel | Janvier 2025

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